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BUZZTOWN 22 septembre 2018 Christophe DUPEU (Harmonica),
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Photos : Valérie CARREAU
La cave du Jazz l'année dernière jouait la carte du voyage, une nouvelle année commence et on peut vraiment dire qu'elle fait doucement rupture avec Buzztown. Pas de voyage, pas de paysage dans le blues complexe de ce groupe français anglophone mais une façon toute personnelle de ramener à soi une culture multiple qui ne rend pas compte fidèlement, en prosélyte, d'un pays ou d'une histoire. C'est que ses quatre membres ont depuis longtemps incubé leur amour du blues ; ne cherchez pas chez eux de l'iconoclastie toujours très attendue mais au contraire un respect distillé de ce qui est venu corporellement à eux et dont ils n'ont paradoxalement pas à faire allégeance. Ils ne rendent plus compte du blues, du jazz, du rock, du reggae ils les ont fait venir à eux comme dans un creuset, un alambic et modestement, systématiquement, avec une belle constance, bâtissent la base d'une pyramide dont la pointe a été ce samedi 22 Septembre l'émotivité conquise de leur public.
Comme ont le dit pour le cinéaste leur pays, leur histoire c'est l'instrument.C'est la question de la complexité de l'identité qui est en jeu et Buzztown y répond avec discrétion et méthode. C'est tout le mérite de la cave du jazz que d'avoir eu l'ouverture d'esprit, payante, d'accepter un groupe - qui ont le suppose par ces temps régressifs, où les médiums artistiques dans le souvenir intempestif des anciennes avants-gardes ne font pas toujours ponts, où l'identité spécifique se doit d'être rapidement et scandaleusement démontrée – qui doit certainement avoir des soucis avec son époque, ses lieux, ses chapelles.
Leur système, fruit de l'exhaustivité de leurs influences prend son temps, se répète de morceau en morceau, sans jamais se radicaliser. Qu'est ce que la radicalité face à la diversité des influences? Pas de reprises mais un fin ouvrage de compositions personnelles qui peut rappeler le novice en théâtre qui se riant des répétitions méticuleuses de son vieux confrère en vient a abdiquer devant la merveilleuse horlogerie de son résultat.
Le cinéaste provocant formule des idées vagues par des images claires, Buzztown pareillement prend plaisir au trop plein de la note mais avec une propreté, une netteté qui leur permettent de contrôler leur hétérogénéité et de proposer ces finales envolées, preuve que le précis engendre l'émotivité.
Excellents musiciens, les mots ne sont pas plus sacrifiés comme on pourrait peut-être s'y attendre en discernant chaque fois leur introduction et conclusion standart à un espace instrumentalisé qui prend largement, dans un entre-deux ventral toute sa liberté. Mais pour autant l'instrumentiste parle-t-il ? Je ne le crois pas tant les soli nombreux sont du pays, ici, du seul sentiment.
Quelle est la modernité auto-proclamée du blues de Buzztown ? Une avancée lente et progressive vers un graissage par l'atmosphère qui emporte très intelligemment l'adhésion et laisse le public de la cave du jazz finalement pantois. Ces jeunes gens ont de la maturité artistique, ils ont trouvé leur formule comme dirait le poète pour mieux l'amplifier ou au contraire decrescendo la marier de silence sans lequel la musique ne serait rien.
Buzztown a donc raison, il fait bien un blues moderne en cela que rigoureux, mais au contraire du peintre et du littérateur ne se résumant pas, il ouvre le champs de l'identité sans aucune mollesse ni indécision. La modernité ici ne déconstruit pas, ne détruit pas pour mieux s'excuser de jouer, mais dans la question identitaire qu'il pose ouvrage son morceau, systématiquement comme avec une belle persévérance et fini par dépasser la clarté de la note pour imposer cette belle ambiance, c'est à dire in fine le mystère invisible de son style.
Fletcher Christian
L'Éclaireur du Gâtinais 5 octobre 2018
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