La Ritmo | Clarinet Connection | René Sopa | |
David Evans | Opus 4 | Major Minor Trio | Little Victor |
Raymond Fonsèque | Marie Ange Martin | Doudou swing trio | Sweet Mama |
Francis Nuel |
ALL STARS 10 janvier 2004
Si lon
en croit le programme, ils devaient être cinq musiciens, à la
Cave de Nanteau sur Lunain, ce 10 janvier 2004, pour rendre
hommage au grand Duke Ellington, dont cest lanniversaire
de la mort. Et ils sont venus à sept se présenter à un public
toujours aussi fidèle, ajoutant au trombone de Francis Nuel, à
la trompette de Jean-Marie Hurel, aux saxos et clarinette de
Michel Duverger, à la contrebasse de François-Xavier Coffre et
à la batterie de Daniel Naudin, la guitare de Michel Vallaux et
le piano de Jean-Pierre Laudry, celui-là même qui accompagna à
lOlympia Sylvie Vartan à ses débuts. Ce fut donc un régal,
à lécoute des standards du début du Jazz, et de musiques
moins connues, mais toutes aussi belles. Si la trompette domine,
elle est soutenue efficacement par les autres instruments du
Band, tandis que les airs qui ont marqué pour beaucoup notre
jeunesse embrasent latmosphère chaleureuse de la Cave, et
que passe la Caravan chère à Django. Saluons particulièrement
lami Francis, pour le plaisir quil nous donna de
partager cet hommage au Duke, au travers de cet instrument
difficile quest le trombone, et dont il sait tirer la
quintessence harmonique. Un bon début dannée, donc, pour
la Cave du Jazz, dont nous attendons avec impatience les
prochains spectacles. Meilleurs voeux à tous, organisateurs
compris.
LA RITMO 07 février 2004
Ambiance "latino",
ce 7 février, à la Cave du Jazz, avec La Ritmo, un quintette
inspiré par la musique chaleureuse et colorée de Cuba et des
Caraïbes, composé dartistes dont le tempérament, nous le
savions, saccorde à merveille avec ce style : de Renaud
Palisseaux et son double clavier à Benoît Sauvé et ses flûtes
à bec, de David Laratta à la basse à Simon Ville aux timbales
et Alain Douied aux congas.
Le public, venu nombreux ne pouvait être que séduit, et sans
nul doute il fut comblé par le talent des musiciens, mais aussi
par une générosité qui trouva rapidement écho dans lassistance,
et qui établit un grand partage émotionnel, dans livresse
dune rumba, dun mambo ou dune salsa, ou encore
dun standard de jazz.
Quel jeu ! Piano tantôt maître, flûte tantôt maîtresse, échanges
complices de lun et lautre, la mélodie fuse,
brillante, rythmée par le tempo habile et insistant des
percussions. Et Benoît le flûtiste, qui a dominé le superbe Evidence de Thélonius Monk, en délaisserait
presque son instrument pour convier à la danse quelque jolie
spectatrice, tandis que les cordes, accompagnées des congas et
timbales, lui laissent le temps de reprendre son souffle.
On retiendra aussi la belle mélodie de Claudia, qui débute le deuxième set et où la
basse de David donne toute sa mesure, dans une musique sculptée
par les variations tantôt acrobatiques, tantôt romantiques du
piano de Renaud. Puis, avec Introduccion, la
vélocité du clavier et de la flûte rivalise avec la rythmique
pleine de verve des percussions, jusquà ce que la mélodie
aille se perdre dans une luxuriance de textures musicales et un
foisonnement extrême de couleurs. Fermons alors les yeux.
Laissons-nous emporter aux sonorités dailleurs. Imaginons
dautres lieux, avec, sous les applaudissements (et même
les ovations) de lassistance, la transe qui sempare
peu à peu de lesprit et du corps, dans une atmosphère
devenue presque fiévreuse.
Lexotisme caribéen en bordure du Lunain ! Que ne dément
pas Bolivia : sous le chant de la basse puis de la flûte,
et prélude à un long solo des timbales ou des congas dAlain
et de Simon, qui nous plonge dans les racines africaines. Ni Almendra, un peu plus précieuse sous lécriture
du piano et de la flûte, mais qui est prélude à dautres
envolées. Le troisième set nen sera que plus flamboyant.
Et après avoir fêté lanniversaire de Bérénice, lune
des spectatrices, exit les chaises : la piste libérée invite à
la danse... Il y a aussi de la magie dans La Ritmo.
CLARINET CONNECTION 6 mars 2004
Le monde se pressait
à lentrée de lAuberge de la Vallée. Il est vrai
que la formation attendue : Clarinet Connection, ce quintet qui
avait déjà enchanté le public de la Cave du Jazz en octobre
2001, laissait prévoir laffluence. Son originalité : deux
clarinettes qui, en symbiose, sous le souffle sensible et le
doigté expert de Michel Mardiguian et de Jacques Montebruno,
vont évoquer ce Jazz merveilleux de la première époque, allant
du New Orleans au Swing, brillamment accompagnés ou soutenus par
la guitare fluide de Laurent Bajata, sous la rythmique créative
et mesurée de Philippe Merville, à la batterie, et de Claude
Quibel, à la contrebasse.
Et personne ne sera déçu. Ambiance de liesse donc, rompue le
temps dune grande émotion, lorsque Michel annoncera :
Monsieur Nougaro, cest pour vous, et que fut interprété Go down, Moses, plus connu sous le titre de Armstrong, en hommage à notre grand disparu. Que
dire dautre, face à ces professionnels de talent qui
vivent et vibrent à cette musique mélodique et colorée quils
aiment et quils savent faire partager, ajoutant au charme
de leur interprétation leur décontraction et leur simplicité.
Que dire dautre, donc, sinon quen leur compagnie,
dans lombre (ou la clarté) du Duke ou de Bechet, de Count
Basie ou de Fats Waller, de Glenn Miller et de Benny Goodman, le
temps passe bien trop vite, malgré les bis (pas moins de trois).
La nuit du dehors, sur le chemin du retour, à la lumière de la
lune et de Vénus, chantera encore du jeu subtil des clarinettes,
des solos inspirés de la guitare (I am in the mood for love), de tout cet ensemble instrumental en
osmose. Peut-être retiendrons-nous en cet instant le célèbre
Nagasaki, l'un des thèmes des prolongations, brillant, véritable
exercice de style où chacun donna le maximum de son savoir-faire.
Mais sil fallait faire un choix, cela me serait bien
difficile. Exactly
like you, nest-ce pas ?
RENE SOPA 3 avril 2004
Ambiance particulièrement chaude,
en ce premier samedi dAvril, pour accueillir à la Cave du
Jazz de Nanteau-sur-Lunain, René Sopa en quartet. Beaucoup de
monde donc, comme à lhabitude ai-je lenvie dajouter,
pour investir un lieu désormais trop petit, mais combien
accueillant, en cela et au travers du sourire des passionnés du
Jazz qui laniment.
On y inaugurait, après la sono de Pierre, la console
déclairage de Gérard, éléments qui visent à ajouter
une qualité technique accrue à la qualité musicale des groupes
qui viennent se produire, comme, ce soir, celui de René Sopa. Il
y avait, entourant ce virtuose de laccordéon jazz : Sandro
Zerafa, à la guitare, Stéphane Benveniste à la contrebasse et
Jean-Luc Ditch à la batterie. Un quatuor de compétition, pour
une musique enlevée, puissante ou déliée, où laccordéon
laisse peu de place à lintimité dune simple mélodie,
mais où le talent du musicien donne la mesure de cet instrument
dont limage est trop communément liée au seul musette.
Outre les compositions de René, comme Sol Po Algave ou Grito, Lucie ou Ballade pour Ann, nous irons dans un grand voyage qui nous
conduira de Gainsbourg à Django, de La Javanèse au Manoir de mes Rêves ou à Nuages, en
passant par linterprétation magistrale du thème principal
dOrpheu
Negro, lequel, au final, ne
nous dissuadera pas dun regard en arrière, sur un temps
fort du concert, par ailleurs inattendu et tout simple : celle du
petit bonhomme à laccordéon, venu présenter du haut de
ses dix ans le résultat de trois ans dapprentissage de linstrument,
Nils Raymond, et auquel René Sopa, avec sensibilité, donna laccompagnement.
Un moment démotion quil me plait de retenir de cette
soirée, par ailleurs brillante.
DAVID EVANS 29 mai 2004
Au programme de la Cave du Jazz de
Nanteau-sur-Lunain, David Evans, cet américain du Mid-South, fou
de blues, à la fois musicien et ethnomusicologue à lUniversité
de Memphis, distingué dans son pays par la Grammy Award. Il était
à prévoir que ce ne serait pas une soirée tout à fait comme
les autres, généralement composées pour le seul plaisir des
sens et du partage musical. Non, la teneur était toute autre.
Et, pour cela, David Evans nétait pas venu seul : il y
avait à ses côtés un autre grand musicien de blues, Little
Victor. Puis des intervenants comme la chanteuse Sofie Kay ou
Thibaut Chopin, harmoniciste à ses heures. Le plaisir de lécoute
était là, certes, mais pas denjolivures inutiles dans
cette musique aux douze mesures immuables et ces chants qui nous
plongent dans les racines de ce qui donna naissance au Jazz et
qui nest pas encore du Jazz : le blues du Delta, un blues
rural, du folk blues.
La petite salle de lAuberge de la Vallée, comble et
chaleureuse comme à lhabitude, quitta donc rapidement les
rives verdoyantes du Lunain pour celles boueuses du Mississippi,
à cette époque où les champs de coton subissent des dévastations
et où commence le grand exode urbain des travailleurs
essentiellement noirs, en but à la pauvreté et à loppression
raciale. Le blues, teinté de linfluence européenne (surtout
irlandaise) succède alors aux Field Hollers des plantations. Le
chant tient de la ballade : lharmonie y est moins
importante que les paroles, lémotion naissant du phrasé
incisif et des vocalises traînantes. Il est intimiste et
primaire, fortement rythmé. Il évoque, sur une note tantôt
plaintive ou tragique, tantôt ironique ou moqueuse, la rudesse
de lexistence, avec ses souffrances et parfois ses petites
joies, la solitude et les rencontres, le voyage sur le steamboat
ou dans le train qui emporte vers linconnu et lespoir,
lamour qui se dérobe, lalcool dans les bouges et
bordels .
Cest cela que chantèrent David et Victor, sans fioritures,
avec une authenticité que seuls de grands connaisseurs et
interprètes peuvent transmettre. Et pour accompagner le chant,
en dehors de linévitable guitare (qui éclipsa banjo et
mandoline), des instruments simples : harmonica, kazoo et
tambourin. Visuellement, nos compères avaient revêtu lhabit
des bluesmen de la ville, symbole de la réussite à venir :
costume et cravate, chapeau clair et chaussures blanches et
noires, bague rutilante à lauriculaire de la main droite,
celle qui anime les cordes de la guitare, et qui lance ses feux
dans la lumière des spots. Tout cela participa à lambiance.
Et, une fois encore, le public apporta sa contribution, scandant
des mains, la pensée certainement quelque part entre New Orleans
et Saint-Louis ou Chicago. Et sur cette participation, Little
Victor, à la manière des noirs, se libéra, détendant latmosphère,
agrémentant son jeu de mimiques gestuelles ou musicales, ainsi
modulant le son de son harmonica avec un simple verre. Un grand
moment de vibration et de compréhension. Merci, Monsieur David
Evans ; merci, Little Victor et les autres.
OPUS 4 19 juin 2004
You love Gipsy
music ? interrogea le
violoneux du groupe, un stroviole
à lépaule (ce curieux violon à pavillon qui date des années
1880). Point nest besoin dattendre la réponse du
public, venu dailleurs pour cela. Et chacun dêtre
transporté illico vers les plaines de Bohême, ou plutôt dans
ce royaume de Tsiganie, bien plus vaste puisquil
na pas de limites, parcouru par le seul souffle de la
liberté et du voyage, et ponctué de ces haltes où il fait bon
se réunir, partager et faire la fête.
Ce ne sont pas des roms,
les artistes dOpus 4, mais ils sont imprégnés de leur
vitalité; ils ont cette intensité dans la gaîté ou la
nostalgie, dans lhumour ou la dérision, qui égaye les
rencontres et rompt les solitudes de la vie hasardeuse, ou donne
leur chaleur aux soirées villageoises qui font oublier le labeur
de la journée. Avec eux, violon, guitares, banjo et contrebasse
vont ainsi évoquer le parcours et les états dâme. Il y a
là les russes Pierre Procoudine-Gorski et Serge Camps, le
polonais Piotr Sapieja et litalien Bruno Ossola. Pas de
choc des cultures dans ce groupe, mais un cocktail explosif qui
fait merveille. Que de talent et que de présence dans ces quatre
gaillards en osmose ! Et que de participation, de la part du
public de la Cave du Jazz, ravi, qui accompagne des mains ou de
la voix les chants, quand il peut le faire, car lors des accélérations
mélodiques, sous le pincement virtuose des cordes ou les
vibratos inspirés de larchet, il faut suivre...
What I say ? En leur compagnie, Les Yeux Noirs de Georgia, vont
ainsi se poser sur les paysages de notre âme, colorés de mélodies
slaves ou yiddisches - ou dailleurs-, puisquen chemin
nous croiserons, entre autres, Django Reinhard et Brassens, Ray
Charles et Gainsbourg. Un parcours éclectique mais ô combien
attrayant, dont les musiques chantent toujours dans les coeurs,
de La
Javanaise à La Chanson de Lara et à Kalinka,
tandis que LAlouette, surgissant des cordes de la guitare de
Serge sous le toucher de simples verres, prend son vol jusquà
ces Nuages légers qui glissent sur le Manoir de mes rêves. Et oui, Django, joue pour moi !.La composition originale dOpus 4 est
une invitation au festival de Samois.
Une soirée exaltante. Un véritable feu dartifice
musical, pouvait-on lire dans les lignes du programme. Et
bien ce fut aussi le prélude aux prochaines festivités du 14
juillet, et personne noubliera La danse du sabre et loriginale interprétation jazzy
de La
Marseillaise.
MAJOR MINOR 10 juillet 2004
Hello like before
Id never come here
If Id known that you were here
I must admit though
Thats its its nice to see you, dear
Ce sont San Francisco
et la Californie qui sétaient donné rendez-vous en
bordure du Lunain. Mais même si la Golden Gate avait été
transférée dans notre vallée, elle aurait été éclipsée par
lapparition de la Silver Lady, parée de boucles doreille
et bracelet étincelants et toute moulée dune superbe robe
aux écailles dargent, éclatante de tous ces feux sous la
lumière des projecteurs,
Une belle apparition plastique
de la grande vedette américaine qui ne pouvait masquer limmense
talent sous-jacent - et la simplicité dêtre - de Joan
Minor, au sourire rayonnant et au regard charmeur
Une soirée
prometteuse sannonçait. Dautant que les partenaires
de la chanteuse sont des musiciens qui savent mettre en valeur la
voix en faisant fi de leur ego
Tout pour la diva ! Ainsi,
Benoît Gil à la guitare, Raymond Doumbé à la basse et, en
cadeau (puisquil nétait pas prévu au programme),
Patrick Buchmann à la batterie
Il ne restait plus quà se laisser emporter aux rythmes du
Jazz et aux inflexions du Blues, - enfin du RhythmNBlues
-, porté par la voix suave de la chanteuse et le swing dune
gestuelle très expressive, où les paroles chantent lamour
et les mouvements du corps évoquent la sensualité des
rencontres.
Et le public, conquis, que peut-il faire dautre, lorsque le
tempo sy prête, que de scander la ballade du battement des
mains !
Instants démotion ou de tendresse, aussi, entre Joan et
Benoît, lorsque la guitare répond à la voix et la voix à la
guitare, puis où leurs voix se mélangent, batterie et basse
accompagnant avec discrétion et douceur le duo. Ainsi au premier
set avec Hello
Like Before, cette très belle
mélodie de Bill Withers, ou encore au second ce vieux standard
de Victor Young et Edward Heyman : When I Fall In Love.
En deuxième partie, petite surprise, avec la venue impromptue de
la jeune Alice (13 ans tout juste), qui vint interpréter à la
guitare, au côté de son père Benoît, une Bossa Nova. Un prélude
agréable au retour en scène de Joan, cette fois parée dune
très belle robe noire, chatoyante et scintillante, qui met
encore une fois en valeur la souplesse dun corps félin et
rehausse la liberté artistique de la chanteuse, au travers dun
programme à cette image. Nul doute que, durant la fête, passèrent
les fantômes attendris daujourdhui ou dhier de
la jolie Rachelle Ferrel, à lécoute de son Dont Waste Your Time ; de Frank Sinatra, lorsque furent chantées
All Or Nothing
At All ou That Old Black Magic ; de Chester Burnett, avec Whos Been Talking, et de tant dautres, comme Billie
Holiday, Aretha Franklin ou Nat King Cole
Sans oublier
George Gershwin
La nuit était douce sur Nanteau, lorsquil fut temps de se
séparer : comme là-bas,
down the West Coast.
-
LITTLE VICTOR'S JUKE JOINT BLUES 28 août 2004
Le hasard fait bien les choses,
parfois, puisque pour la dernière séance de la Cave du Jazz, à
lAuberge de la Vallée de Nanteau sur Lunain, le blues nétait
pas seulement dans les curs, mais au programme de la soirée.
Nous y retrouvions cette autre vallée, celle du Mississippi, que
nous avait fait découvrir il y a peu David Evans, avec aujourdhui
comme invités, Little Victor et son trio, le Little Victor Juke
Joint Blues. Il faut dire aussi que le blues nest pas
seulement du blues, et le vague-à-lâme
latent, sous lhumour percutant de Victor, le regard masqué
par des lunettes noires, fut rapidement dissipé, après cet
avertissement : Jespère que vous aimez le blues !
Parce cest tout ce que nous allons jouer !
Je me souviens dune anecdote évoquée par un bluesman dont
jai oublié le nom, qui illustre bien ce quest
vraiment le blues, attaché à exprimer les choses de la vie dans
ses différentes facettes, avec ses peines, ses joies, ses révoltes.
Cest sans doute pour cela, dailleurs, que les
costumes des artistes sont damascés de paillettes qui éclatent
de lumière, comme un défi à la pauvreté et au mal-vivre
Cest un musicien de là-bas, un homme ordinaire dans une
vie ordinaire. Il est marié, et il a rencontré une fille
superbe, avec qui il a rendez-vous. Mais elle ne viendra pas et,
sans doute, sur sa guitare, fredonna-t-il sa déconvenue, voire
une certaine désespérance. Alors il rentra chez lui . Mais un
mot de sa femme lattendait, disant quelle le quittait
: ce fut alors une grande joie qui transforma son blues
. Cest
peut-être de lhumour de dérision, un peu sombre ou cruel,
mais le blues est tout cela, des portions de vie que lon a
le besoin dexprimer et, si possible, de partager.
Et le partage, en cette soirée du 28 août, fut grand. Avec des
musiciens remarquables, imprégnés de létat desprit
du sud et de ce blues des années 40 qui sépanouit de
Memphis à Chicago et rayonna bien ailleurs
Car comment ne
pas évoquer, au côté de Little Victor, harmoniciste et
guitariste parfois acrobatique, avec sa voix et sa présence
permanente, Sophie Kay, au timbre un peu acide et à la guitare
dorée, et le batteur Éric RockinLulu Lelet -
un vrai pro, efficace, qui sait accompagner le chant.
Et les histoires courent, comme la fabrication du Canety Blues,
cocktail de jus de citron, de sucre et de kérosène (rien à
voir avec le cocktail de Maïté, le Jazzy Blue), ou encore lévocation
de ces fabricants dalcool, à lépoque de la
prohibition, capables de faire du whisky écossais 10 ans dâge,
la veille, dans leur baignoire
Les titres se succèdent,
que lon oublit, trop denses de paroles...
Mais la magie du blues, lorsque les artistes sont de grand
talent, est que, même si on ne saisit pas toujours le sens des
phrases américaines, est quil vous emporte et vous
transporte, dans un rythme de la voix et des instruments qui ne
faiblit jamais. Et le temps passe sans quon ny prenne
garde. Que dire ! On est captivé, séduit
Et les rappels, où le public debout scande la mélodie, firent
que la soirée déborda dans la première heure du lendemain.
Une dernière séance qui laissera un souvenir chaleureux dans
les esprits, en attente de louverture de la nouvelle cave,
en un autre lieu, un lieu de partage dactivités, à Lorrez
le Bocage, mais où lon peu prévoir que léquipe de
Jazzy 77 saura garder ce qui fit le renom de la Cave de Nanteau :
la qualité, lauthenticité et la convivialité.
RAYMOND FONSEQUE QUARTET 18 septembre 2004
-Aux dires des organisateurs de
Jazzy 77, la première séance dans la salle Sainte-Anne de
Lorrez le Bocage, navait rien dimprovisé. Cela
faisait des semaines quils se réunissaient, que leurs
cogitations parfois contradictoires sefforçaient de
transformer une salle polyvalente en un cadre jazzistique
attrayant et en symbiose avec lart. Que de plans élaborés
et discutés !
Plusieurs heures nécessaires pour réfléchir,
mais surtout concevoir, élaborer et préparer limplantation
des chaises et les structures de la scène
Et le grand jour
était là.
Grande fébrilité donc, ce samedi 18 septembre, pour accueillir
le célèbre Raymond Fonsèque et son quartette, et ce fut tôt
dans la matinée que léquipe de la Cave sétait
retrouvée, sactivant, délimitant, construisant,
installant et décorant lespace, dans loptique de la
meilleure convivialité,
avec la pensée de réussir la
soirée, sachant que tout serait perfectible, mais seulement après
lexpérience déterminante de la première soirée.
Mais lessentiel était là avec, par-delà linquiétude
latente inévitable, lenthousiasme de vouloir réussir laccueil
des musiciens et public
Un pot de bienvenue annonçait lambiance. Beaucoup de
visages amis dans lassistance, - les habitués de Nanteau -,
mais aussi des nouveaux, et des personnalités locales
Le
président Alain Bois en profita pour présenter son équipe,
sous les applaudissements, y ajoutant, avec un brin démotion,
labsence pour maladie de lami Francis Nuel, lun
du fameux Salamanders Jazz Band de Fontainebleau,
tromboniste de talent et membre de Jazzy 77.
Et puis, il y eu Raymond Fonsèque, lune des grandes
figures du Jazz de Saint-Germain des Prés, qui fréquenta, entre
autres, les Coleman, Bechet et Mezzrow, et les orchestres dHélian,
Luter, Reweliotty, Saury. Toute une époque, enrichie durant 74
ans, enfin un peu moins, puisquil devint professionnel à
19 ans
Un grand savoir-faire, une maîtrise exceptionnelle
du superbone, ce trombone de sa composition, à la fois à
coulisse et à piston
Et un humour permanent (quel bavard
!) : on napplaudit jamais sur un accord de 7e de
dominante, avertit Raymond lors dapplaudissements
personnalisés, - cette 7e qui ouvre tant dhorizons,
notamment sur la 9e ! -. Comprend qui pourra, parmi les néophytes
que nous sommes ! Mais les anecdotes ou remarques se succèdent,
entrecoupant les morceaux où seront évoqués Armstrong,
Moustache, Coleman ou Henri Salvador
Aux côtés du maître, dans une interprétation toute en
acoustique (ce qui devient rare), la trompette de Marcel
Bornstein, le banjo de Jean-Paul Muriel et le tuba de Francine
Fonsèque, des artistes dont Raymond, pour diverses raisons,
narrive pas à se défaire et pas seulement en
regard dinstruments joués tout en finesse et en mesure,
avec toute la subtilité de jeu souhaitable. Sans oublier ces mélodies
très chantantes, comme When you're smiling ou Rose de Picardie, qui ne peuvent que ravir les spectateurs.
La surprise vint de la présence dans le public du leader du
Fidgety Feet Jazz Band, le trompettiste Jean-Marie Hurel, qui
insuffla durant le dernier set son talent et une vigueur nouvelle.
Merci Jean-Marie pour ce buf !
Quajouter ? Ce fut une soirée réussie, même sil
reste quelques petites améliorations à apporter pour parfaire
le cadre
À suivre donc.
MARIE-ANGE MARTIN 9 octobre 2004
-Octobre 2004, le 9, salle Sainte-Anne
à Lorrez-le-Boccage. À la grisaille froide du dehors, porteuse
de nuages et de pluie, la nouvelle Cave du Jazz
opposait la lumière chaude de ses parasols, éclairant la petite
scène qui, sur fond rouge, est lélément central dun
dispositif daccueil à géométrie variable, destiné à créer
lintimité. Celui-ci fit merveille, encore une fois ce soir-là,
accueillant les nombreux spectateurs venus découvrir Marie-Ange
Martin et son quartet.
Marie-Ange Martin, cest un cas dans le Jazz. Son parcours,
depuis son initiation musicale dans les soirées gitanes de la
Chope des Puces de Saint-Ouen à sa participation à
la Rapsody in Blue avec lOrchestre national de
Paris ou celui de Radio-France (en passant par une solide
formation au Guitare Institute of Technology de Los
Angeles), ne pouvait laisser deviner la tonalité de son concert
à la Cave du Jazz.
Eh bien, ce fut superbe, dautant que ses compagnons, Gérard
Siffert à la trompette, Pierre Maingourd à la contrebasse et
Alain Chaudron à la batterie, furent des acteurs véritablement
en osmose avec la guitariste
Point de lyrisme débridé
dans ce jazz maîtrisé ! Mais un jeu tout en finesse, bien
construit tout en laissant place à limprovisation, et qui
suggère le tempo plus quil ne le décrit, soutenu par une
complicité intense des musiciens. Faire ressentir la
pulsation du jazz sans quelle soit marquée, cest lessence
du Jazz, nous dira plus tard Gérard Siffert. Avec des échanges
brillants entre une trompette et une guitare en harmonie, qui ménagent
des temps de respiration dessinés par une contrebasse et une
batterie en sourdine, dans une rythmique soyeuse et douce
Du grand art, que la sonorisation de la salle, bien dosée, sut
mettre en valeur. La finesse dun quatuor de musique
de chambre ; de la dentelle !, commente lors dune
pause Serge, un spectateur. Et cela fut partagé de manière
intense avec le public, qui rythma la soirée de ses
applaudissements nourris. Et les quelques Nuages qui glissèrent sur les parasols de la scène ne
furent que ceux, magnifiquement interprétés, de Django.
Oui, du grand art !
Et lors du dernier set, qui accueillit deux des anciens des
Salamanders, Jean Marie Hurel à la trompette et Michel
Duverger au sax-ténor, ce fut un final plein délan et de
liberté. Ah, ces échanges brillants de trompettes entre Gérard
et Jean-Marie !
DOUDOU SWING TRIO novembre 2004
- La salle de la Cave du Jazz, à Lorrez, s’était dotée de son nouveau système d’éclairage, destiné à apporter un bon contraste scénique. Il restait à accueillir les musiciens. On les attendait sous la forme d’un trio avec, autour de Philippe “Doudou” Cuillerier, au chant et à la guitare, la rythmique formée par la jeune guitariste Victorine Martin et le contrebassiste Antonio Licusati ; mais ils vinrent à cinq, le trio de “gadjé” s’adjoignant les talents du tsigane roumain Emy Dragoï, à l’accordéon, ainsi que celui du “rocker” italien André Venturini, à la steel-guitare. Une formation in fine éclectique, mais en parfaite harmonie, qui fit merveille devant un public particulièrement nombreux… Il est vrai que le programme était une promesse de grand voyage, sur les chemins poussiéreux et hasardeux des roulottes manouches, balayés par les vents de l’aventure. Il le fut, au travers de l’humour tantôt décapant ou tantôt tendre de Doudou, aussi à l’aise dans le chant que dans le “scat”, de la brillance de jeu d’Emy et des finesses “hawaïennes” d’André, du tempo fidèle de Victorine et d’Antonio… Ainsi les anecdotes ou les confidences servirent-elles de support à nombres d’évocations, accompagnées d’un swing porteur de drôlerie ou de gravité, de contestation ou de nostalgie, mais aussi de musette, invitation à la danse, de préférence après un savoureux repas à base de “niglo” (hérisson) bouilli (latcho xaben !)… De grandes rencontres émaillèrent le trajet, d’Higelin (avec un bel hommage à Django) à Nougaro, d’André Mariel à Max Jacob, des textes préparés à la sauce “Doudou”, donc teintés de sa verve et de sa facture très personnelle, avec ce charme auquel il serait bien difficile de se soustraire. Il reste à attendre la sortie prochaine du premier CD du groupe, et répondant au titre “À feu doux”. Un régal en perspective.
- Approche des fêtes et besoin de se détendre, ou notoriété du groupe Sweet Mama, toujours est-il que le public venu applaudir “Cajoune” et sa boy’s band poitevine fut particulièrement nombreux, à la salle Sainte-Anne de Lorrez-le-Bocage, tant qu’il fallut, au su de l’ampleur des réservations, modifier l’organisation de la salle. Plus de deux cent trente visiteurs pour une soirée mémorable, ou plutôt pour un grand voyage “jazzy”, des bayous du grand sud nord-américain aux grandes plaines d’Europe centrale. Et, comme compagnons de route, des musiciens de talent et en grande complicité… Aux côtés de la pétulante Catherine Girard, dont la voix s’accorde tant aux accents country ou cajun qu’à ceux du blues, carapaçonnée d’un washboard (la célèbre planche à laver des lavandières de Caroline et de la Nouvelle Orléans), enrichi de cymbales et d’une poêle à frire (sans oublier d’autres instruments insolites dont elle use à merveille avec parfois une certaine impertinence, comme le kazoo ou la jazoflûte), des pros : Philippe Juhel, à la guitare et à l’harmonica, Stéphane Barral, à la contrebasse, et Jean-Christophe Rouet, au violon swinguant et parfois empreint de dérives tsiganes, passant allègrement, pour le style, de Stuff Smith à Stéphane Grapelli ; c'est lui qui nous avait ravi par sa maestria virtuose à Nanteau-sur-Lunain, en juin 2003, au sein du groupe Hùrlak. Alors comment ne pas les suivre avec délectation, à la découverte de paysages, là évoqués par la voix chaude et teintée d’humour de “Cajoune”, là dessinés par le glissement de l'archet ou le pincement des cordes du violon ! On se laisse porter, goûtant les dialogues chaleureux de l'instrument avec la guitare ou l’harmonica, sous le tempo discret et efficace de la contrebasse et les sonorités alertes et inventives du washboard… Et on est en osmose avec ces compagnons de route de bonne compagnie, qui savent à merveille faire découvrir des sensations nouvelles et originales, même au travers des quelques vieux standards, comme Tiger Rag et Honeysuckle Rose, qui jalonnent la route. On prendra même le chemin de fer, tracté par une locomotive à vapeur comme il n’en existe plus, dans un jeu très évocateur de tous les instruments. Quant au final, au terme d’un superbe medley festif, il se termina par une “standing ovation” et beaucoup d’éclat dans le regard des spectateurs.
Hùrlak | Calligaris/de Preissac trio | Philippe Macé Quartet | |
Washboard five | Mamouchka Trio | Gilda Solve Quartet | Cotton club |
Hùrlak, cest linvitation au voyage. Un grand voyage où les cordes inspirées du quatuor dessinent le paysage en des couleurs musicales superbes et invitent à le parcourir. Il y a là la guitare très créative et brillante de Thierry Vaillot, au coeur et au regard andalou, le violon sensible et véloce de Jean-Chistophe Rouet, qui génère lémotion en passant daccents pizzicati aux envolées lyriques, le tout scandé à la guitare rythmique, précise et enfiévrée, de la belle Céline Roumet (qui ne ménage pas ses cordes jusquà, parfois, les rompre), à lunisson des résonances profondes de la contrebasse dÉric Onillon. Notes pincées ou caressées, tranchées ou voluptueuses. Guitares et violons se répondent en un émouvant et magnifique chant et partagent une belle mélodie damour, aux amples facettes, avec ses espoirs, ses passions et ses nostalgies. Correspondances gitanes et tziganes, ou encore manouches. Parfois, le violon laisse larchet aux doigts agiles qui vont pincer les cordes, tandis que la contrebasse, en dautres moments, soffre aux caresses voluptueuses du crin. Quelles sensualités, au travers des vibrations étranges, syncopées ou lancinantes, qui racontent le voyage. Ah, croiser en la compagnie dHùrlak léclat nomade de beaux Yeux Noirs ! Ivresse des sens, transparences de lâme qui laissent percevoir les flammes du désir. Donne-moi ta main, belle étrangère venue dailleurs, dAndalousie ou des Carpates, la musique te va si bien ! Donne-moi ta main et entrons dans la danse, tandis que les notes ségrènent, fusent ou éclatent, comme leau vive du torrent sur son chemin de roches, puis se donnent à lémotion née du swing des autres cordes. Cétait à La Cave du Jazz de Nanteau sur Lunain, un soir de juin 2003, le 24, par une belle nuit de pleine lune. Où le contrebassiste attendait avec une impatience fébrile mais contenue lannonce possible de la naissance dun fils ou dune fille. Chacun gardera le souvenir des regards qui brillent, des corps en mouvance, qui exhalent la sueur. Battements de mains, qui accompagnent et qui applaudissent. Partage des émotions entre musiciens et public. Dans les bagages de tous, à la fin du voyage, une grande provision de bonheur. Merci Hùrlak, merci La Cave du Jazz !
CALLIGARIS/DE PRESSAC TRIO 05 juillet 2003
Deux Calligaris, Pierre et Robin
le père et le fils -, et puis De (ux) Pressac. Un jeu de mots
formulé par le président de Jazzy 77, Alain BOIS, et que ne démentent
pas les trois compères, à leur arrivée. Alors, trio ou quatuor
? On na guère le temps de sy arrêter, tant la
maestria de jeu du groupe vous entraîne avec la plus grande
aisance dans la volupté musicale. Et cest vrai quils
furent sous le charme, les spectateurs de la Cave de Nanteau, ce
samedi 5 juillet, conquis, participant des mains mais aussi de la
voix à un swing qui vous plonge dans latmosphère des
nuits de la grande époque jazzie de Saint-Germain des Prés. Du Blues du Dentiste à Caravan ou Minor Swing, dArmstrong à Bechet, de Benny
Goodman à Django, de Bessie Smith à Nina Simone. Une invitation
tant à l'écoute qu'à la danse. Fulgurant Pierre Calligaris,
dont les mains virtuoses et acrobates semblent survoler le
clavier du piano, effleurant à peine les touches et laissant
comme par magie les notes se libérer et écrire les mélodies.
Voix chaude de Philippe de Pressac, souvent rocailleuse (le style
du roi Louis), toujours teintée dhumour, et accompagnée dune
gestuelle très évocatrice, lorsque sa clarinette inspirée
accepte de prendre quelque repos. Et quelle complicité entre les
deux compères ! "Savez-vous que Philippe de Pressac descend
des Bourbons ?", interroge soudain Pierre Calligaris, sans
doute tenté de faire montre dune certaine culture généalogique.
Mais lun ou lautre (la mémoire hésite) de
poursuivre aussitôt : "4 ou 5 par soir !". Voilà pour
lambiance ! Cest bien sûr une boutade, qui donne le
climat dune soirée qui fut une fois encore dexception,
brillante et chaleureuse. Et noublions pas la batterie
nerveuse et nuancée de Calligaris junior ! Oui, fantastique
Robin qui nhésite pas à quitter un instant ses
percussions pour parcourir avec une fausse désinvolture les méandres
de la salle, se frayant le passage entre les spectateurs, à la
recherche de sonorités nouvelles, inventées au hasard des matériaux
rencontrés, de la scène au bar. Quelle maîtrise !. Ambiance
hot, donc, survoltée, où la sueur perle sur les visages des
musiciens et le plaisir sur celui du public. Et pour tenter de
clore le concert car il se poursuivra encore ensuite sous linsistance
des applaudissements le boeuf accueillera les trombones de
Francis NUEL et Jean-Luc DE MORAS, des fidèles appréciés de la
Cave du Jazz et de Jazzy 77.
Un quatuor de choc, pour honorer la présence, à quelques années-lumière de la Cave de Nanteau-sur-Lunain, de la planète Mars, jamais aussi proche de notre planète bleue : le Philippe Macé Quartet. Un ciel nocturne limpide mais scintillant, en harmonie avec les sonorités cristallines du vibraphone, lun des grands instruments spécifiques au Jazz, avec la guitare électrique et la batterie. Le magicien, cest Philippe, debout devant son clavier de métal, artiste virtuose du jeu des mailloches ces baguettes de bois dont la tête en caoutchouc est recouverte de laine et qui vont frapper les lattes métalliques de linstrument qui recouvrent des tubes résonateurs (un couple de mailloches dans chaque main, que les doigts agiles vont rapprocher ou écarter pour créer les accords). Les notes ségrènent, fluides, laissant les fondamentales se fondrent dans les harmoniques. La ligne mélodique est le plus souvent simple, bien définie, mais selon des tempos qui créent, au gré de phrasés complexes, un véritable maillage visuel des baguettes, dans la rémanence du regard et le vibrato de la mélodie. Penché sur son clavier, activant du pied la pédale de sourdine, lartiste est acrobate, parcourant du regard ses trois octaves et du geste la frappe, dans des échanges sensibles et superbes avec les autres instruments : la guitare experte et brillante de Gérard Curbillon, aux sonorités sensuelles ; la contrebasse de Jean Bardy, aux accents déliés et profonds ; et la batterie bien maîtrisée dAndréa Micheluti, que Philippe sait accompagner avec discrétion dans ses solos dimprovisations. Au programme, Gershwin, John Lewis, Lionel Hampton, Duke Ellington, Cole Porter, Horace Silver,. et des mélodies où le rythme laisse place à la romance. Nous noublierons pas : The one and only Love, Delaunay Dilemna, Prelude to a Kiss, Night and Day, Micase Dream. Oui, une belle nuit, constellée et vibrante, dans la vallée du Lunain
WASHBOARD FIVE 20 septembre 2003
Sympathique prestation, ce 20 septembre, à la Cave du Jazz de Nanteau, colorée des accents du sud outre-atlantique, de cette Nouvelle-Orléans qui nous projette aujourdhui dans le temps davant, alors que la musique était essentiellement festive. DArmstrong à Bechet, en passant par Fats Waller ou King Olliver, ou encore Billie Holiday, la promenade est belle, des champs de coton de Louisiane aux Champs Élysées parisiens. Toute une alternance de musiques chantées par les orchestres noirs et les orchestres blancs dalors, et interprétées avec talent par le jeu du trombone de Jack Cadieu, par le swing velouté de la clarinette (ou du sax) de Dominique Bertrand, par le tempo précis de la contrebasse, animée des doigts ou de larchet par Bernard Brimeur, par le rythme précis du banjo de langlais Alan Kelly, et les sonorités métalliques du washboard de la prêtresse aux doigts dor Suzanne Barthès, la fameuse Calamity.
MAMOUCHKA TRIO 11 octobre 2003
On sattendait à un long voyage dans la steppe russe, avec le romantisme des grands espaces et des passions extrêmes, avec le lyrisme de musiques qui expriment si bien les élans du corps et des c¦urs, de la danse et du chant. Ce fut mieux que cela, car cest lâme russe qui était au coeur du voyage. Un parcours donc plus intimiste, à la découverte dun petit village perdu quelque part, là-bas, en bordure de rivière et de forêt, teinté des petites joies et peines de chaque jour, où la vodka fait oublier les difficultés de la vie. Avec pour guides trois jeunes femmes toutes aussi talentueuses les unes que les autres. Il y avait là Moïra, la plus discrète, mais amoureuse de la contrebasse que son corps épouse en souplesse dans ses mouvements, et dont les doigts experts ou larchet conduisent la fête. Il y avait là Veronika et sa guitare, Natalia et son violon, deux voix aux timbres étranges et qui racontent si bien les histoires, en musique ou à capella. Ce fut magique ! Découter, de partager, de samuser, même lorsque la tristesse est parfois évoquée. Il est vrai que la présence de Natalia, la plus grande des trois, avec ses couettes et son minois expressif, avec sa verve et ses intonations malicieuses, et sa gestuelle théâtrale, avec les subtilités du jeu de son violon ou du battement de simples 'cuillers' de bois finement décorées, contribua à créer une atmosphère que lon rencontre rarement. Une soirée dexception où les spectateurs étaient venus nombreux, et sont repartis avec dans la tête des évocations où il était question de paysages enneigés, de chevaux (ah, le hennissement au violon !), damoureux, de moustiques, des travers de la vie, de castors, et dun certain guide, quun autre chanteur rencontra jadis sur la Place Rouge, au café Pouchkine.
GILDA SOLVE QUARTET 08 novembre 2003
À lAuberge de la Vallée de
Nanteau-sur-Lunain, la Cave du Jazz revendique son exigence de lexcellence.
Et ce 8 novembre, il était bien au rendez-vous de la qualité,
le Gilda Solve Quartet, entre austérité du noir des vêtements
et vitalité de la couleur jazzy, centré sur la grande chanteuse
de San Francisco, au corsage-boléro brodé de rameaux dargent.
Il y avait là Pierre Galas, pianiste brillant et jazzman de
renom, Gus Nemeth, à la barbe grise caressant le manche dune
contrebasse inspirée, Pier Paolo Pozzi, la tête penchée sur
ses percussions, batteur inventif et subtil, qui sait ce quaccompagner
veut dire. Quant à Gilda, moins femme fatale que sur la
photographie du programme, elle était le charme personnifié,
avec un regard qui séduit même si les yeux se ferment, avec une
voix où la pureté rime avec sensualité, avec un corps et une
gestuelle qui épousent, sous linspiration de grands
standards de jazz, mélodie et rythmique. Peut-être, en début
de soirée, la belle américaine fut-elle un peu sur la réserve,
et le public en attente de quelque chose de plus. Mais cela
advint, coïncidant avec larrivée inopinée du guitariste
Benoît Gil, familier de cette autre grande dame du jazz quest
Joan Minor. Des retrouvailles musicales après quelques 15 ans dabsence
! Et une étincelle qui embrase les coeurs. Voilà Gilda qui se
libère, virevoltante, superbe dune présence entre swing
et scat et qui entraîne le public sur les chemins du partage et
de lémotion. Prelude to a kiss
cède à No
greater love. Une invitation
au voyage en compagnie de Gershwin, Sonny Rollins, Bunk Johnson,
Mercer, le Duke. Le meilleur du Jazz, revisité et proposé par
une grande ambassadrice ! Alors, Save your love for me, aucun problème, Gilda !
COTTON CLUB 06 decembre 2003
Ce 6 décembre 2003, la froidure hivernale qui baignait à la nuit tombante les environs de la Cave du Jazz de Nanteau-sur-Lunain devait céder rapidement sous la chaleur du Cotton Club Quartet, venu évoquer ce Jazz authentique et superbe des débuts, celui qui voyagea presque des champs de coton de Louisiane aux caves de Saint Germain des Prés, et fut créé et chanté par les plus grands, de Duke Ellington à Sydney Bechet. Un récital qui relia le jazz traditionnel au jazz latino. Pour évoquer cette musique colorée, ils sétaient présentés en noir et blanc : pantalon noir et gilet blanc rayé, noeud papillon (il y manquait seulement le canotier !). La classe, quoi ! Même si, en fin de soirée, pour cause de fièvre et de liesse, lhabillement fut plus décontracté. Toute une époque, donc, revisitée avec talent, et proposée dans la bonne humeur et avec humour, ce qui ne gâche rien !Il y avait là Pascal Perrin, arrangeur des standards et auteur-compositeur, jonglant entre clarinette et saxophone-soprano, habile à exprimer le meilleur de la mélodie, Sylvain Gontard et sa trompette inspirée ou acrobate, les deux compères saccordant à merveille pour converser mélodiquement de leurs instruments de la manière la plus brillante. Et cela sous la rythmique nerveuse du banjo de Bob Garcia, leader et animateur, et celle plus sourde et nuancée du soubassophone dOlivier Michaud. Quel ensemble ! Personne noubliera lun des bis, le When the Saints. bien connu, au cours duquel le clarinettiste démonta les diverses parties de son instrument, continuant de jouer sur celles restantes, jusquau seul embout. Et que de bonheur pour le spectateur que jétais de pouvoir ressentir une émotion musicale de cette qualité, née en vérité de la rencontre de musiciens hors pair mais aussi dun public toujours aussi chaleureux !